Lors de son passage à Montgenèvre le weekend du 30 Janvier 2021, Benoit Biteau, député européen, a été témoin d'une verbalisation injustifiée de deux bénévoles de Médecins du Monde, alors dans leur véhicule associatif. Leur attestation qui justifiait leur présence en dépit du couvre-feu n'a même pas été contrôlée. Ces bénévoles sont du personnel médical qui portent assistance et soins aux exilés qui franchissent la frontière franco-italienne, parfois dans des conditions dantesques.
Témoignage de Benoit Biteau : « La première info que j’ai, quand j’arrive à Montgenèvre, c’est que les forces de l’ordre viennent de verbaliser Médecins du Monde : ils leur demandent de quitter la ville. Je sens la pression, la tension. Je ressens beaucoup de respect pour ces citoyens qui s’engagent et y passent un temps incroyable. Ils puisent dans leurs ressources physiques, ils jalonnent les montagnes pour essayer de porter secours à des personnes en difficulté dans la neige à des températures extrêmement basses. Ça force le respect. Ils sont nombreux, et j’y ai croisé beaucoup de jeunes animés par un humanisme, par la fraternité.
Ce qui est révoltant, c’est la façon dont les représentants de la République – forces de l’ordre, qu’elles soient Police aux Frontières ou gendarmerie, la Préfecture, gèrent cette situation-là. Traquer des êtres humains comme des animaux dans les bois : cette façon de faire amplifie les risques pris par tout le monde. La traque également des bénévoles qui essaient de porter assistance aux personnes en quête de refuge est insupportable.
Ce n’est pas ça, la République en laquelle je crois.
Ce n’est pas ça, la République qui inscrit sur le fronton de ses mairies « Liberté, Egalité, Fraternité ».
Ce n’est pas ça, la République des droits humains qui s’est construite sur le socle de l’humanisme et de la solidarité.
Ce n’est pas ça.
Les personnes exilées que j’ai rencontrées sont des gens qui ont un fort niveau d’étude, qui sont parfaitement pacifiques, qui recherchent l’hospitalité parce que dans leur pays les conditions de vie sont insupportables. Ce sont des gens qui prennent des risques énormes, qui ont fait le choix de s’éloigner de leurs racines, des terres où ils sont nés, ce qui est extrêmement douloureux, dans des conditions très précaires. L’alibi qui consiste à dire qu’on ne peut les accepter sur notre territoire car ils sont de potentiels terroristes est absolument fallacieux. Intolérable. Les décisions d’État qui sont prises le sont elles aussi : surtout, elles sont illégales.
La première maraude dans laquelle je m’engage à mon arrivée ce soir-là consiste donc à retrouver les forces de l’ordre qui ont verbalisé Médecins du Monde : la situation est inédite. Après discussion, le capitaine de gendarmerie appelle ses supérieurs hiérarchiques et efface la verbalisation : je vérifierai que cet engagement a été tenu.
Le bras de fer, c’est la détermination… et déterminés, nous le sommes : dans le retour des valeurs de la République, du respect de la loi ; dans notre volonté à ne pas laisser faire l’insupportable.
[Benoit BITEAU]