La puissance, la capacité de nuisance, le cynisme et l’indécence des lobbies des pesticides sont souvent évoqués, mais rarement réellement présentés avec suffisamment de fidélité. Goliath est le film qui évoque sans complaisance l’ampleur de la froideur d’un univers où seul le profit à court terme de quelques uns anime ses protagonistes, au détriment de l’interêt commun, du climat, de la biodiversité, de la santé et globalement de l’intérêt supérieur des générations futures.
Au fil des deux heures de projection, à titre personnel, j’ai l’impression de voir défiler les quinze dernières années de notre vie, avec mon épouse, où se côtoient l’émotion, la colère et l’espoir.
D’abord l’émotion de replonger dans les douloureux moments vécus auprès de mes collègues paysan·nes malades à cause des pesticides, revivre leurs souffrances palpables, et jusqu’au bout ressentir cette terrible sensation d’impuissance et d’injustice. Ce film leur rend aussi hommage.
L’émotion également douloureuse, des pressions, des actes, des pratiques sans scrupule de ces acteur·rices dénué·es de toute forme d’humanisme et d’humanité, capables d’attentats en nous tirant dessus à deux reprises, en dégradant nos récoltes, en vandalisant nos infrastructures de production, en utilisant des méthodes de communication basées sur le mensonge, la calomnie et la diffamation, dans la plus grande impunité puisque les plaintes et procédures ne sont pas prises au sérieux et finissent par des classements sans suite absolument inadmissibles.
Ensuite la colère de constater que les discours simplistes, étriqués, cloisonnés, exclusivement imaginés par le prisme d’une économie ultra libérale sanctuarisant les logiques « d’après moi le déluge », continuent de faire recette chez les hauts fonctionnaires et les élu·es refusant de convoquer les approches globales, les données objectives et les visions à long terme, alors qu’ils ne devraient être que les garant·es de politiques publiques ne servant que l’intérêt commun. Et sur ce chemin, la vie et l’avenir de nos enfants sont sacrifiés avec la complicité impardonnable de politiques qui ne mesurent toujours pas l’ampleur de leur irresponsabilité.
Enfin l’espoir que ce film fasse éclater au grand jour les coulisses de ces pratiques immondes. Que leurs victimes soient enfin entendues, respectées et que réparations soient faites des dégâts causés par autant de malveillance et d’inhumanité. J’ai cet espoir, en général pour ceux et celles qui souffrent depuis trop longtemps, et plus particulièrement pour mon entourage proche, mon épouse, ma famille, mes enfants, mes salariés humiliés par ces mensonges, ces calomnies, ces diffamations qui piétinent injustement la qualité de leur travail et de leur engagement citoyen, pour des causes pourtant justes et infiniment respectables, au service de l’avenir de nos enfants.
L’espoir ultime que mes collègues élu·es reçoivent, grâce à ce film d’une troublante fidélité à la réalité, l’électrochoc nécessaire les conduisant à enfin s’appuyer sur les éléments scientifiques robustes et objectifs, plutôt que sur les logiques corporatistes éculées et irresponsables, pour bâtir des politiques publiques qui soient enfin et définitivement au rendez-vous de l’histoire.
Goliath, un film à voir absolument.
[Benoit BITEAU]